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Du béton #BasCarbone (Le béton – épisode 2)

Du béton #BasCarbone (Le béton – épisode 2)

novembre 21st, 2019 // 12:58 @

Le buzzword #BasCarbone est à l’honneur dans le BTP … vraisemblablement plus dans la communication pour l’instant que concrètement sur les chantiers.

Figure 1 : « faible empreinte carbone », « bas carbone »… chez les majors

L’objectif #BasCarbone des majors vise avant tout à modérer l’empreinte carbone du béton grâce à des ciments « bas carbone ». Une véritable révolution ? Pas vraiment certain !… plus sûrement un moyen de « ne rien changer ». L’ambition est bien évidemment moins de limiter les volumes de béton mis en œuvre (in fine les m² construits en béton) que de limiter l’impact CO2 de chaque m3 et de modifier les modes constructifs. Pourquoi pas ? après tout, si les constructeurs arrivent à maintenir une activité prospère avec un impact sur le climat « maîtrisé », ce ne sera pas si mal.

Les ciments « bas carbone » sont-ils la solution ?

Les « nouveaux » ciments « bas carbone » structurels[1] (destinés aux ouvrages en béton armé, pas les colles et mortiers) ne sont aujourd’hui ni plus ni moins que des avatars des ciments au laitier de haut fourneau. Ces nouveaux ciments, obtenus à partir de granulés de laitier de haut fourneau (granulé vitrifié)[2], sont des ersatz de ciments qui étaient déjà utilisés pour la construction du métro de Paris dès 1898. Ils permettent une réduction importante des émissions de CO2 grâce à la valorisation d’un déchet de l’industrie de la fonte et de l’acier. Malheureusement, au regard des volumes coulés aujourd’hui, ces ciments ne peuvent constituer qu’une solution partielle (la production des hauts fourneaux déclinant au profit de l’aciérie électrique). Ces ciments sont une petite partie de la solution et ne se substitueront pas à la totalité des volumes utilisés aujourd’hui en France.

Figure 2 : source  https://fr.wikipedia.org/wiki/Haut_fourneau

chiffres ciment 2018

Figure 3 : en 2018 la France a consommé environ 18 millions de tonnes de ciment. La production de laitier de haut fourneau (granulé vitrifié) est de moins de 2 millions de tonnes par an et les capacités excédentaires sont marginales.

Les ciments « au laitier », « bas carbone » ou CEMIII, ont un impact carbone réduit car les laitiers sont aujourd’hui considérés (par les cimentiers) comme des déchets de l’industrie de production de la fonte et ont un facteur d ‘émission nul (l’ensemble des émissions de GES d’un haut fourneau sont allouées à la fonte). Les industriels de l’acier considèrent eux les laitiers comme des co-produits et leur allouent une par des émissions de GES de la fabrication de la fonte. Il y a donc un biais dans la répartition des émissions acier/laitiers. Si la valeur de ces laitiers augmente du fait d’une demande plus forte de ciment « bas carbone », il est probable que les industriels de l’acier reviendront à la charge pour les transférer une partie de leurs émissions de GES et réduire ainsi celles de la fonte ou de l’acier. Pour info, le secteur de la production d’acier est soumis au marché des quotas d’émissions SEQE[3], les émissions de GES ont constituent donc pour ce secteur un réel enjeu financier.

Les ciments bas-carbone constituent une solution intéressante, à ne pas négliger, mais qui restera vraisemblablement marginale dans le monde actuel et futur du BTP. Une solution plus globale consisterait à revoir les usages du béton et les modes constructifs.

Faut-il bannir le béton, cette « pierre liquide » si pratique ?

Le béton armé est un matériau avec des qualités exceptionnelles : durabilité, résistance, liberté de forme, disponibilité, facilité de conception, même son prix fait partie de ses qualités !… Mais il a un défaut majeur son empreinte carbone.

Au regard de tous ces avantages, il serait dommage de le mettre au ban de la construction. Il serait cependant raisonnable de réduire son usage et de l’utiliser pour des usages qui nécessitent (réellement) ses qualités. Il est tout à fait pertinent par exemple de réaliser en béton un ouvrage d’art, une passerelle, un pont, une poutre de grande longueur, un voile de soutènement… des ouvrages qui nécessitent des performances mécaniques et/ou une longue durée de vie et/ou une résistance aux agressions climatiques (nécessité d’un entretien réduit). Mobiliser d’importantes émissions de CO2 pour un ouvrage qui va durer un siècle a bien sûr du sens. Utiliser du béton, par facilité, pour les ouvrages provisoires (installation de chantier provisoires, dalles de stockage, cheminements de chantier, fondations pour ouvrages temporaires…), des ouvrages qui pourraient être réalisés avec un impact plus faible (voile non porteur en bois, BA13) est en revanche aujourd’hui « très regrettable ».

cheminements provisoires en béton

Figure 4 : beaucoup de CO2 définitif pour des ouvrages temporaires

A suivre : Episode 3 : Comment réduire les volumes de béton mis en œuvre ?


[1] Des avancées existent pour les ciments « colle » ou mortier, notamment

[2] https://www.ctpl.info/les-laitiers-siderurgiques/

[3] https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/marches-du-carbone


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