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Les bâtiments à énergie positive (BEPOS) n’existent que sur le papier!

Les bâtiments à énergie positive (BEPOS) n’existent que sur le papier!

octobre 10th, 2010 // 10:41 @

Si vous lisez la presse, vous êtes forcément tombé sur ce terme « bâtiment à énergie positive ». Pour le profane, le concept laisse imaginer un bâtiment source d’énergie, une prouesse technologique, solution à tous les problèmes énergétiques et environnementaux, comme le mirage de la voiture électrique représente le remède miracle aux futurs problèmes de déplacements individuels de masse. Mais que veut dire précisément « énergie positive », parle t-on d’énergie primaire, comment définit-on ce que l’on compte, ou met-on les bornes du système ? Cette notion « d’énergie positive » mérite d’être éclaircie.

Partant du constat que 40% de la consommation d’énergie totale de l’Union Européenne est due aux seuls bâtiments, et dans le but de réduire la consommation énergétique de l’Union pour se conformer au engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto et de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), ainsi que pour sécuriser ses approvisionnements énergétiques, l’Union a décidé de donner corps à ce concept de bâtiment à énergie positive avec la directive 2010/31/UE « Nearly zero energy » (publiée au JO de l’Union Européenne le 19 mai 2010).

Un bâtiment « nearly zero energy », est un bâtiment répondant à la définition suivante « La quantité quasi nulle ou très basse d’énergie requise devrait être couverte dans une très large mesure par de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, notamment l’énergie produite à partir de sources renouvelables sur place ou à proximité ». Cette directive impose que tous les bâtiments soient à « énergie positive » en 2020 (en 2018 pour les bâtiments publics), du moins pour les bâtiment neufs, pour les constructions anciennes la directive s’applique en cas de « grosse rénovation » et dans le cas ou la mesure est « techniquement, fonctionnellement  et économiquement réalisable ».

Les plans nationaux doivent définir les exigences (énergie primaire kWh/m2/an), donner des objectifs pour 2015 et établir les mesures à mettre en œuvre pour y arriver. La Commission Européenne évalue les plans et éventuellement émet des recommandations. Les États peuvent déroger à la directive dans le cas ou l’analyse coûts/bénéfices calculés sur la durée de vie économique du bâtiment en question est négative. Pour le 30 juin 2011, les États doivent établir les mesures et instruments permettant de respecter la directive. La France à retranscrit l’obligation communautaire dans les textes de loi (grenelle 1), dont l’article 4 fixe l’objectif suivant « toutes les constructions neuves faisant l’objet d’une demande de permis de construire déposé à compter de la fin 2020 présentent, sauf exception, une consommation d’énergie primaire inférieure à la quantité d’énergie renouvelable produite dans ces constructions, et notamment le bois énergie ». La commission conseille, émet des recommandations, assiste les États et favorise les échanges de bonnes pratiques. Les certificats de performance énergétique doivent être mis en place, ils doivent établir des valeurs de référence, des exigences minimales et doivent être valables dix ans maximum.

Le concept reste encore un peu flou, comment défini t-on les bornes de l’étude? L’énergie grise est elle prise en compte (la fabrication,  l’usage…), a priori, non!  Les calculs et simulations des bureaux d’étude ne résistent pas aux consommations mesurés. C’est le cas de la tour ELITHIS de Dijon, qui était présentée comme le premier bâtiment tertiaire français à énergie positive, répondant à la directive européenne ci-dessus. Après une première année d’exploitation (seuls 5 étages sur neufs étaient occupés), la tours n’est pas à énergie positive, mais elle reste néanmoins au dessus des exigences théoriques BBC, les capteurs ont livrés leur verdict:

Pour le chauffage, les occupants n’ont pas validés les hypothèses de calcul. Le critère de 20° C n’était pas au goût des utilisateurs qui ont exigé 22°C. Ces deux petits degrés ont fait grimper la consommation annuelle de 4.32 kWhep/m2 SHON / an (de 2 estimé à 6.32). Le rafraichissement a apporté quelques gains, la ventilation quelques pertes. Les pompes quelques pertes également. Une surprise : l’éclairage de l’escalier serait supérieur aux consommations des ascenseurs. Les consommations professionnelles (ordinateurs et serveurs) représentent un tiers des consommations et le plus gros dérapage (excès d’optimisme, et mauvaises hypothèses du BE).

Pour ce qui est de la production les panneaux photovoltaïques (1m2 pour 11m2 de SHON) ont produit 78000kW/an soit 48 kWhep / m2 SHON / an.

Conclusion

Le résultat final affiche un déficit de 50%.  Si le concept ne répond pas aux espoirs, il convient de noter que le bâtiment est encore en phase de réglage, et que si la cible n’a pas encore été atteinte, le résultat tout de même notable est que le bâtiment enregistre un bilan de 49.63  kWhep / m2 SHON /an, ce qui le classe parmi les meilleurs établissements de ce type. Dans l’étude Bilan Carbone d’une maison de retraite, les résultats de la phase construction (énergie grise), représentent 56 ans de consommation de 50kWhep/m2 SHON. Pour être puriste (sur les impacts sur le réchauffement climatique et les consommations de la tour) pour être rigoriste est surtout pour afficher un bilan global de l’opération, il conviendrait de rajouter un chiffre de cet ordre au bilan de la tour ELITHIS  (faire un Bilan Carbone® de la phase construction)

(sources de cet article :  divers articles Le Moniteur, JO Officiel de l’UE, Grenelle1…)
tour ELITHIS
consommations estimées
consommations   mesurées
(kWhep / m2 SHON / an)
(kWhep / m2 SHON / an)
consommations
chauffage
2
6,32
rafraichissement
10,6
6,23
ventilation
13,1
14,08
pompes et auxiliaires
1,1
2,6
ascenseurs
3,6
3,58
éclairage
10,5
9,5
activités professionnelles
24,2
54,6

total
65,1
97,63
production
photovoltaïque
-50
-48

bilan C-P
15,1
49,63

Category : Bilan carbone &Bilan carbone chantier

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